1921 : L’Armée Rouge envahie la Géorgie.
1923 : La famille Pagava s’exile en France et s’installe à Montrouge
1932 : Intègre l’Académie Ranson, au sein de l’atelier de Roger Bissière
1944 : Première exposition à la Galerie Jeanne Bucher
1958 : Peinture monumentale pour le fronton du pavillon du Saint-Siège pour l’Exposition Universelle, à Bruxelles
1966 : Représente la France à la 33ème Biennale de Venise
1968 : Exposition rétrospective au château de Ratilly
1972 : Exposition inaugurale de la Galerie Darial (y sera exposée régulièrement jusqu’en 1996)
1979 : Décès du peintre Vano Enoukidzé, son compagnon de vie
1982-83: Rétrospective itinérante de son oeuvre dans les Musées de Dijon, Beauvais, Reims, Troyes et Montrouge.
1988 : Vera Pagava décède le 27 mars
Vera Pagava est une artiste peintre, graveur et dessinatrice géorgienne, rattachée à la Seconde École de Paris. Figurative à ses débuts sa peinture évolue au début des années 1960 et prend un chemin plus personnel et exigeant, qui l’amène à l’abstraction « vécue comme une nécessité » dit-elle, et « comme la recherche absolue de la transposition picturale de la lumière ».
« La peinture nous reflète, c'est un miroir miraculeux dans lequel le monde extérieur voit notre monde intérieur, le talent est le moyen de communication entre nous et la vie, les hommes, le ciel et la terre.» Vera Pagava, extrait d’une lettre à Roger Hilton, Montrouge, le 15 avril 1936.
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Enfance
Vera Pagava est née en 1907 à Tiflis, aujourd'hui Tbilissi, en Géorgie, au sein d’une famille de la noblesse libérale éclairée. Son père, Georges Pagava, est juriste et sa mère, Alexandra Naneichvili, est professeure de littérature. Son oncle, Guiorgui Naneichvili, est proche des artistes et des milieux intellectuels de la capitale tels que les peintres David Kakabadzé, Hélène Akhvlediani ou encore Lado Goudiachvili. Dans les années 1910, la Géorgie, alors au sein de l’Empire Russe, est un creuset culturel et politique bouillonnant où se mêlent, artistes, poètes et intellectuels d’avant-garde parmi lesquels Maiakowski ou les frères Kirill et Ilia « Iliazd » Zdanevitch. Enfant, Vera Pagava est très imprégnée par l’effervescence artistique et intellectuelle de ce monde prérévolutionnaire.
En 1919, la famille Pagava quitte la Géorgie en raison de l'état de santé du père. De 1920 à 1923, is vivent à Berlin et à Dresde, et sont très rapidement intégrés au sein de la communauté artistique et intellectuelle allemande. Pendant ce temps, la Géorgie est envahie par les troupes de l’Armée Rouge. Le gouvernement social-démocrate en place depuis l’Indépendance de la Géorgie proclamée en 1918, est contraint à l’exil en 1921. C’est alors toute une société, politique et intellectuelle, qui émigre à Paris avec l’espoir d’un retour prochain. En 1923, la famille Pagava rejoint la communauté géorgienne en exil en France et s’installe à Montrouge.
Années d’apprentissage – années 1920-1930
Dès son arrivée en France à l’âge de 16 ans, Vera entreprend une formation artistique, d’abord à l’école préparatoire des Arts Décoratifs, puis à l’école Arts et Publicité où elle s’initie aux techniques de la gravure sur bois et de la linogravure, et à l’atelier d’André Lhôte en 1929 où elle étudie le croquis.
En 1930, les Pagava emménagent au 2 Cité Rondelet à Montrouge, pavillon dans lequel elle vivra toute sa vie. La même année, un jeune géorgien en exil, Vano Enoukidzé, trouve à se loger chez les Pagava. Cette rencontre sera le début d’un compagnonnage fidèle et complice de toute une vie.
De 1932 à 1939, elle intègre l'Académie Ranson, au sein de l'atelier de Roger Bissière, sur les conseils de son ami, le peintre Nicolas Wacker et massier à l'Académie. Elle y étudie la peinture d’après modèle vivant et la fresque. Elle y rencontre ceux qui deviendront ses amis les plus fidèles ; parmi eux, Jean Bertholle, Maria Helena Vieira Da Silva, Arpad Szenes, Etienne Martin, Roger Hilton, Jean Le Moal, François Stahly, Elvire Jan, Charlotte Henschel et Guidette Carbonell. Le jeune critique d’art Jacques Lassaigne, à la recherche de jeunes talents, fréquente également l’Académie.
Elle réalise en 1936 et 1937 deux peintures murales pour des écoles du 20e arrondissement de Paris. En 1938 et 1939, elle participe aux expositions du groupe Témoignage initié par Marcel Michaud. Elle expose des tissus peints. Pendant toutes ces années, Vera travaille pour vivre en faisant du tricot et des impressions de tissus d’ameublement pour un drapier de Lyon.
Années 1940
Après la déclaration de la guerre, Vera Pagava souhaite apporter son aide, elle s’inscrit à l’école d’infirmières de la Croix Rouge et obtient son diplôme. Les années de guerre et d’Occupation sont particulièrement difficile pour Vera et sa famille. Alors que la majorité de ses amis artistes quittent la capitale, elle reste à Paris.
En 1943, elle fait la rencontre de Jeanne Bucher, galeriste visionnaire, qui sera une personnalité déterminante pour sa carrière. Celle-ci lui propose d'exposer ses peintures aux côtés de Dora Maar l'année suivante. Cette première exposition marque le début de la collaboration entre la galerie et l'artiste. Pagava y sera présentée régulièrement jusqu'en 1960.
Au cours de ces années, elle se lie avec un grand nombre d’artistes : Alberto Magnelli, Hans Reischel, Karl Longuet et Simone Boisecq ou encore Hans Arp.
Elle participe au Salon des Surindépendants à Paris en 1948 et 1949 ainsi qu’au Salon d’art français contemporain au Musée National de Stockholm, en Suède.
Jusqu’à la fin des années 1950, Vera Pagava peint principalement des natures mortes, des thèmes mythologiques et bibliques, des paysages et des villes figuratives.
Années 1950
Cette décennie est celle de la reconnaissance artistique. Elle fait des rencontres importantes comme Pierre et Kathleen Granville, collectionneurs et grands mécènes ainsi que Joseph Pichard qui lui ouvre les portes du Salon d’Art Sacré dès 1950 et auquel elle participera jusqu’en 1984. Elle participe également régulièrement aux Salons de Mai (1943, 1950-1955, 1967) et aux Réalités Nouvelles (de 1959 à 1985). Vera Pagava est exposée régulièrement en France, notamment chez Jeanne Bucher et à l’étranger, en Suède, au Danemark, en Allemagne, Italie, États-Unis (Yale University Gallery ; Meltzer Gallery à New York, Pittsburg...), en Suisse et en Norvège (exposition itinérante avec Vieira Da Silva et Janice Biala aux musées d’Oslo, Bergen et Trondheim).
En 1951, l’État fait la première acquisition d’une de ses œuvres, Nocturne, une nature morte. En 1955, elle peint sa première toile entièrement abstraite Le Carré Ivre, mais ne poursuivra ses recherches vers l’abstraction qu’une décennie plus tard.
En 1958, Vera Pagava reçoit une commande du comité français, pour le pavillon du Saint-Siège de l’Exposition Universelle de Bruxelles. Elle réalise une peinture sur bois monumentale, Le Christ recevant les âmes au Paradis destinée au fronton de l’église du Pavillon.
Années 1960
Au début des années 1960, Vera Pagava, se retrouve sans galerie pour la représenter. Elle travaille seule, soutenue par ses amis peintres et sculpteurs, et par Jacques Lassaigne, Pierre et Kathleen Granville et Joseph Pichard. C’est à cette époque que sa peinture se libère et évolue vers l’abstraction, dans laquelle elle trouve une véritable liberté.
Elle réalise entre 1962-63 et 1967 une série d’aquarelles évanescentes non-figuratives. En 1966, elle représente la France à l’occasion de la 33e Biennale de Venise. Une salle du pavillon français est consacrée à ses aquarelles.
A partir de 1965 (et jusqu’en 1988), Pagava participe régulièrement au Salon de Montrouge.
En 1968, la première exposition rétrospective de son œuvre est organisée au Château de Ratilly dans l’Yonne.
Années 1970
En 1970, elle fait la rencontre du poète et éditeur Pierre Lecuire et de son épouse la poète Mila Gagarine, avec lesquels elle se lie d’amitié. Ils collaborent ensemble à la publication de nombreux livres (Le Livre des livres, 1974 ; Pasargades, 1977 ; Poèmes métaphysiques, 1979 ; Âme Une, 1981) pour lesquels Pagava réalise des gravures sur bois et pointes sèches.
En 1971, Vera Pagava se voit proposer par Thamar Tsouladzé-Taly, compatriote et amie depuis le début de leur exil, de participer à l'aventure d'une nouvelle galerie de peinture contemporaine. La galerie est appelée Darial, du nom du seul col franchissable des montagnes du Caucase, entre la Russie et la Géorgie. En 1972, une exposition des peintures récentes de Pagava fait l'ouverture de la galerie. A ses côtés, la galerie présente des artistes contemporains internationaux et devient l’un des lieux de rassemblement de La Spirale, une association d’artistes femmes fondée par Charlotte Calmis. En 1978, Vera Pagava, Aline Gagnaire et Charlotte Calmis sont l’objet d’une série de portraits documentaires « Point d’émergence », dédiée aux femmes artistes, réalisés par la vidéaste féministe Carole Roussopoulos et de l’historienne d’art Marie-Jo Bonnet.
En 1975, le musée d’art moderne de la ville de Paris acquiert une nouvelle œuvre, une « bataille », La Bataille de Troie (1947).
En 1979, le peintre Vano, son compagnon de toujours, s’éteint après une longue maladie.
Années 1980
En 1980, Serge Lemoine, alors directeur de la DRAC de Bourgogne, commande à six artistes une œuvre pour le bâtiment des Télécoms de Dijon. Aux côtés de Pierre Soulages, Shirley Jaffe, François Morellet, Anne Beothy et Hubert Munier, Vera Pagava peint un triptyque abstrait. Affaiblit physiquement, elle est aidée d’amis artistes et travaille dans l’atelier de la sculptrice Alicia Penalba.
En 1982 et 1983, les musées de Dijon, Beauvais, Reims, Troyes, Montrouge lui consacrent une exposition rétrospective itinérante : Un Parcours de 1932 à 1982.
En 1986, à la demande de l'Abbé Louis Ladey, Vera Pagava créée les vitraux et le mobilier liturgique pour l’église Saint-Joseph de Dijon. Cette commande sera la dernière de sa vie. Elle s’éteint en mars 1988, à l’âge de 81 ans.